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Vins et vignobles

Branceilles : la Trilogie des 1001 Pierres !

en Vallée de la Dordogne

Aux confins de la Corrèze et du Lot, entre les rivières de la Dordogne et de la Vézère, à deux pas de Collonges-la-Rouge, et non loin du gouffre de Padirac et de Rocamadour, se niche au milieu des collines Branceilles un petit village (250 âmes à peine) qui recèle un savoir-faire étonnant pour la région : “ Eh oui ! On fait du vin en Vallée de la Dordogne ! ”.  J’ai hâte de découvrir de quoi il retourne. Invité  à la présentation des nouveaux millésimes Mille et une Pierres (c’est le nom de la cave viticole et de l’appellation), j’arrive dans un havre de paix totalement préservé : des petites maisons en pierres avec des toits de tuiles rouges, des granges typiques de la Corrèze, des châtaigniers, des chênes et des noyers, et partout de la vigne à perte de vue. Ici ça sent la truffe et les cèpes. Tout est vert ! Un paradis sur terre !

La volonté des passionnés

La cave est au centre du village : on sent que c’est le cœur de l’activité. On ne peut pas la louper ! Inscrit fièrement sur la façade de pierres : “Les Vignerons de Branceilles”.

Je suis accueilli par Philippe Leymat, président de la coopérative. L’homme est souriant et me propose d’entrée de le tutoyer. Il s’intéresse à son visiteur, me demande d’où je viens, ce que je fais dans la vie, ce que j’aime dans le coin, si je connais les vins d’ici…

Et surtout, il est passionné, et parle avec enthousiasme. 

“Au début du siècle, il y avait un marché aux truffes énormes à Branceilles, avec facile deux tonnes par an, et les vignes couvraient alors la moitié de la commune, pas loin de 500 hectares !”

Et puis il y a eu le phylloxéra, la vigne a laissé place aux vergers de noyers et de chênes truffiers pendant des décennies. Jusqu’à ce qu’un groupe de femmes et d’hommes de passion, décide de renouer avec la tradition viticole de Branceilles, et lui redonne vie. La première vendange est une réussite ! Le millésime 1990 est excellent ! Un bon présage alors pour ce pari collectif de faire revivre les vins de Branceilles sur ces terres argilo-calcaires parfois assez ingrates.

“ C’est une cave très familiale ! Il y a 7 exploitations. Sylvie, Jean-Paul, Michel, Vincent, Laurence, Georges, Philippe, Pierre… Tous sont au Conseil d’Administration ! Les décisions sont prises ensemble ! La coopérative est au service des viticulteurs et les accompagne dans leurs choix respectifs. Pas de préférence ! Sur les 33 hectares, 15 ha sont en bio et 18 ha en conventionnel. On veut répondre à tout le monde. On veut avant tout un vin avec des caractéristiques. “

Ici, on parle de cépages en cabernet franc et merlot pour les rouges, gamay pour les rosés, sauvignon et chardonnay pour les vins paillés. Les installations sont modernes et au service de la qualité : une cuverie thermorégulée pour le chai de vinification, associé au chai à barriques en bois dans les sous-sols qui permet lui l’élevage en fûts de chêne, 

“La qualité du bois des tonneaux fait la différence ! Et puis sans sulfites, ça veut dire une hygiène du chai irréprochable. Le meilleur moyen de ne pas ajouter de sulfites, c’est de faire ça proprement. Ici, vous avez un super outil pour travailler !”

Un terroir entre truffes et noix

Le tout est supervisé par Hervé le maître du chai depuis 25 ans ! Justement, Hervé me propose d’aller faire un tour dans les vignes. Nous prenons une voiture qui visiblement sert à tout sauf à faire de longs trajets… La route n’est pas très longue, on s’arrête déjà et Hervé me montre un super panorama avec vue sur le village. Puis on repart pour s’arrêter quelques dizaines de mètres plus loin. Nous sommes littéralement entourés de vignes ! Branceilles est vallonnée, la nature et les vignes sont omniprésentes.

« Cette année, nous avons eu un printemps humide qui a permis de bien reconstituer les réserves en eau, et un été sec avec des vendanges sans pluie. C’est l’idéal ! ».

Hervé a le sourire. L’année précédente, en 2017, cela avait été le coup dur avec un gel qui avait détruit quasi 80% du raisin. Un coup de froid fin avril qui avait été une catastrophe. La récolte avait été très faible, sans vin rouge, et peu de rosé. 

« 2017, c’était 280 hectolitres contre 1.300 habituellement ! Mais en 2018 on fait 200.000 bouteilles ! C’est une super année ! On travaille pour 2019 à présent. Il faut revenir cet été ou aux vendanges ! Toutes les vignes seront vertes et pleines de raisins ! »

Il m’explique alors la différence entre la coupe courte “en cordon de royat” et la coupe longue “à guyot simple ou double”. La première donne des bras vigoureux, on peut l’utiliser pour rajeunir le cep. Pour la seconde, il me montre deux petites baguettes à l’horizontale desquelles vont partir 3 ou 4 “coursons” qui vont monter en “palissage” pour donner un “mur de vigne”. Je le crois sur parole, c’est assez technique pour quelqu’un comme moi qui n’y connaît rien.

Nouvelle gamme et “coups de boost”

De retour au chai, je rencontre Frédéric Thiollet, œnologue, qui a un laboratoire avec son père Pascal dans le Lot à Pescadoires. 

“ Les millésimes 2018 des vins de Branceilles sont exceptionnels ! ”

L’oenologue a même son coup de cœur préféré dans la gamme : sans hésitation, le Triadoux rouge Bio 2018

“ C’est bio et sans sulfites ! Sans sulfites, ça vous rapproche du raisin et de l’origine du vin ! Ce Triadoux est très net et sans déviation, très fruité, avec un aspect velouté et une belle sucrosité en bouche. Une belle jeunesse du fruit mais il est déjà prêt à boire. Comment ne pas être amoureux de ce vin ! ”

Son œil pétille, alors que c’est lui l’expert ! Pour lui c’est une belle surprise et même une découverte. 2018 se présente comme un cru exceptionnel après 2017 (annus horribilis).

Philippe Leymat parle lui de “coups de boost” : une nouvelle identité, un nouveau logo, une nouvelle communication, un nouveau site web (en ligne dans une quinzaine de jours avec même un module e-commerce) travaillés avec une agence de communication de Brive. Avec notamment une feuille retournée vers le haut pour plus de dynamisme, et un passage aux chiffres : “1001 Pierres” remplace “Mille & Une Pierres”.

Mais aussi une nouvelle gamme : les différents vins (rouge, rosé, bio) portent les noms de lieux-dits sur lesquels sont implantées les parcelles de vignes de la coopérative (Triadoux, Quinçonne, Le Champ du Clos). La nouvelle trilogie des 1001 Pierres !

Soit 3 Triadoux : le Triadoux Rouge Bio, le Triadoux Rouge conventionnel, et le Triadoux Rosé Bio. Puis 2 Quinçonnes : le Quinçonne Rouge et le Quinçonne Rosé.

Plus une cuvée spéciale 2015 “Le Mille et une Pierres” qui va s’appeler à l’avenir “Champ du Clos, une sélection parcellaire qui peut vieillir 8 à 10 ans. 

“ Quelque-chose de supérieur en termes de matières, structures, maturité, une cuvée plus riche, moelleux et doux, avec un petit aspect truffé. Une petite note typique des vins de Branceilles ”, renchérit Frédéric l’œnologue.

La dénomination “Vin de paille de la Corrèze” étant contestée va être dorénavant remplacée par “Les Miels des Muses”, vins passerillés blanc et ambré. Passerillés ? C’est une technique de surmaturation assez originale : on stocke les grappes de raisin pour une maturation par dessèchement. Avant on faisait ça sur de la paille d’où le nom. Ce passerillage hors souches (au contraire de celui sur souche pour obtenir la “pourriture noble” comme les Sauternes), se fait à partir de vendanges très saines, et un stockage et une aération sur claies, selon une technique propre.

“ C’est un vin unique et très original, avec des notes très confites mais sans excès de sucre. Le chocolat permet de boire beaucoup de Miels des Muses : c’est un problème ! ”, plaisante l’œnologue.

Philippe m’explique encore que la coopérative se restructure pour s’ouvrir aux nouveaux arrivants, qui parfois ne viennent pas du monde de la vigne au départ. Et que la cave de Branceilles organise des portes ouvertes du 27 avril au 1er mai de 9h à 19h sans interruption, avec une nocturne le 30 avril, avec des groupes de musique sur les 5 jours, et un concert jazz pour la nocturne 

“J’ai pensé appeler ça Piano-barriques !” : me dit-il avec un clin d’œil en nous quittant, “un piano jazz au milieu des barriques… “. Une très belle idée je trouve.

Il y a 1001 projets aux 1001 Pierres. 

Et 1001 raisons de venir rencontrer les vignerons de Branceilles.

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